Les emplois verts sont-ils vertueux ?

Petit manuel de décryptage pour travailler dans des métiers écologiques et solidaires.

Les emplois verts sont aujourd’hui sur toutes les lèvres. Face aux défis de la transition écologique, ils sont présentés comme la voie médiane qui garantirait écologie et prospérité… L’ADEME envisage ainsi qu’un million d’emplois verts pourraient être créés d’ici 2050. Et pourtant, derrière des statistiques en pleine croissance, c’est (malheureusement) une réalité bien différente que découvrent celles et ceux qui souhaitent s’y engager pour contribuer activement à la transition.
Avant toute chose, il faut commencer par quelques éléments de définition pour s’accorder sur les termes utilisés. Au point de départ, on retrouve les travaux d’institutions publiques (INSEE et ONEMEV) qui cherchent à définir la notion d’économie verte dans le contexte de développement durable du début du 21e siècle. Celles-ci ont contribué activement à la reconnaissance de deux nouvelles notions (à cette époque) : celle des emplois verts et celle des emplois verdissants. Kezako ?

Vous avez dit emplois verts ?  

Les emplois verts sont les emplois qui ont pour finalité de contribuer à mesurer, prévenir, maîtriser, corriger les impacts négatifs et les dommages sur notre environnement. On peut y retrouver un vaste ensemble de métiers, certains anciens, d’autres nouveaux : réparation, gestion des déchets, énergies renouvelables, isolation thermique, gestion des eaux usées, gestion et préservation des espaces naturels, éducation au développement durable…
L’Etat considérait qu’en 2018, ils représentaient 140 000 emplois, soit 0,5% des emplois dans notre pays. La distribution d’eau et d’énergie représenterait 41% de ces emplois quand la gestion des déchets en représenterait, elle, 36 %. Des secteurs d’activités aujourd’hui dominés par des grands groupes où on est encore bien loin de voir incarner la transition écologique dans les actes (ni même dans les intentions) !
Emplois et gestion des déchets

36% des emplois verts sont dans les déchets. Des activités pour la plupart pointées du doigt pour leur manque de transparence, d’éthique et leur immense gaspillage de ressources. @Ivan Mauxion

Quelques lectures édifiantes comme le livre Recyclage : le grand enfumage de Flore Berlingen ou la bande dessinée très documentée Déchet Land d’Anne Belot, suffisent à comprendre pourquoi être dans un « secteur vert » ne signifie nullement œuvrer automatiquement pour la transition écologique et solidaire. C’est même malheureusement parfois tout le contraire ! 

Une économie à « verdir » ? 

Les emplois verdissants sont, eux, des emplois qui n’ont pas une finalité « environnementale » mais sont voués à évoluer afin de s’adapter aux défis de la transition. Dans cette catégorie très ouverte, on peut retrouver des restaurateurs qui changent leurs approvisionnements, des paysagistes et des jardiniers qui adaptent leurs pratiques à la préservation de la biodiversité, des industries qui s’orientent vers le bas carbone, des agriculteurs qui passent à une agriculture paysanne ou encore des artisans du bâtiment qui s’inscrivent dans une économie circulaire des matériaux

L’Etat considérait qu’en 2018, 3,8 millions d’emplois seraient concernés par la nécessité de se « verdir » ! Ils seraient 37% dans le bâtiment, 20% dans les industries, 20% dans les transports et quelque 6% en agriculture, sylviculture et espaces verts…

On retrouve dans ces emplois verdissants, dans notre région lyonnaise, d’authentiques exemples de transformation d’activités traditionnelles en activités à la pointe de la transition. C’est en particulier le cas de jeunes pousses qui changent la donne dans leur domaine comme Pistyles dans le jardinage, À la Source, L’Épicerie Équitable ou le GRAP dans le monde des épiceries, De L’Autre Côté Du Pont, Équilibres Café et les restaurants du Grenade dans le monde de la restauration, Les Curieux, We Dress Fair ou Loca Loca dans la mode ou encore la CAE Cabestan ou Oikos dans le bâtiment.

Epicerie A la source

Les rayons d’A la Source, première épicerie locale, écologique et réellement zéro déchet à Lyon. @Lara Balais

Cependant, lorsqu’on évoque le chiffre de 3,8 millions d’emplois, ce ne sont pas tant les jeunes pousses qui mènent la bascule de notre économie que les vieilles branches installées de longue date qui sont comptabilisées. Dans ce monde des branches professionnelles traditionnelles, ce sont plutôt des évolutions marginales qui s’opèrent, essentiellement contraintes par de nouvelles normes et réglementations. C’est le cas des chauffeurs routiers, des artisans du bâtiment, des acheteurs, des gestionnaires d’espace verts souvent cités dans les travaux statistiques…

Choisir entre jeunes pousses et vieilles branches ?

Ainsi, on voit deux tendances apparaître, celle des jeunes pousses et celle des vieilles branches, qu’il est absolument nécessaire de distinguer pour ne pas s’emmêler les pinceaux entre celles qui mènent le changement et celles qui doivent s’en inspirer pour évoluer. 

  • Les jeunes pousses : des entreprises et associations nées dans la dernière décennie qui inventent des solutions et réinventent les métiers pour pousser le plus loin possible la transition écologique. Celles-ci sont souvent montées par des personnes en évolution professionnelle. 
  • Les vieilles branches : des métiers traditionnels qui s’adaptent progressivement aux enjeux, à la fois grâce à la formation initiale des professionnels et aux efforts de formation professionnelle portée par les branches et les chambres consulaires. 

Si les premières sont encore minoritaires, parfois même une poignée dans des secteurs comme la mode ou le bâtiment, elles sont décisives à étudier parce qu’elles sont le laboratoire des solutions qui se généraliseront demain. Une généralisation qui aura lieu soit parce qu’elles influenceront les vieilles branches, soit parce qu’elles viendront s’y substituer, comme nous pouvons déjà le constater dans le monde des épiceries ou de la restauration. 

Si les statistiques ne les montrent pas, ce sont pourtant elles qui sont les lieux d’accueil les plus propices à toutes celles et ceux qui évoluent pour mettre leurs compétences professionnelles au service de la transition !

Adapter le tableau de bord ou changer la destination ?

Les emplois verts et verdissants, pris comme une donnée statistique, ne permettent pas de mettre en lumière cette question fondamentale : quelles activités changent réellement la destination de notre économie, pour que celle-ci soit écologique et solidaire, et quelles activités restent dans le business as usual (toujours le même business) en adaptant quelques paramètres pour respecter les normes et les obligations réglementaires, mais sans volonté d’une réelle transition face au dérèglement climatique et à la biodiversité qui s’effondre ? 

Rien dans les données n’offre, ainsi, la possibilité de distinguer entre un agent de collecte et de tri d’une multinationale des déchets et un animateur du Minéstok de Minéka qui œuvre pour le réemploi dans les déchets du bâtiment. 

Et cela s’explique. La vocation de ces données publiques n’est pas politique : il ne s’agit pas de donner aux citoyens des informations sur la transition – même si elles sont parfois ainsi maladroitement reprises dans certains médias. Ces données s’inscrivent dans le tableau de bord des institutions qui pilotent notre économie actuelle, avec vocation d’accompagner son évolution sans avoir pour mission de la révolutionner. 

Elles n’ont ainsi pas vocation à mettre en lumière les signaux faibles qui nous intéressent, nous, pour comprendre quelles activités, très souvent portées par des jeunes pousses, sont en train de bouleverser, révolutionner, transformer notre économie pour qu’elle devienne réellement écologique et solidaire. C’est la vocation de notre projet de recherche Economie & métiers de la transition

L’économie de la transition : des artisans de la bascule !

Afin de distinguer les grands champs statistiques des emplois verts et des emplois verdissants de celui des structures qui portent effectivement les solutions de la transition écologique et solidaire, nous avons choisi d’utiliser le mot (très imparfait !) d’économie de la transition

Comment définir cette économie ? C’est celle qui rassemble les entreprises et les associations qui mènent la bascule de notre économie vers une économie réellement écologique et solidaire. Celles qui tentent d’aller le plus loin possible dans la conception et la mise en pratique des solutions les plus abouties

Aujourd’hui, c’est environ 500 structures de la transition que nous avons identifiées sur la région lyonnaise. Un chiffre qui sera progressivement affiné, en dialogue avec ces structures, afin entre autres, d’identifier le nombre d’emplois que ces structures portent actuellement et prévoient de créer dans les prochaines années. 

C’est cette économie de la transition qui nécessite que de plus en plus de personnes s’y engagent dans leur vie professionnelle pour venir aider les jeunes pousses qui grandissent d’année en année. C’est vers ces jeunes pousses, porteuses des métiers écologiques de demain, qu’évoluent la plupart des personnes que nous formons dans le cadre de Nouvelles Voies. C’est aussi leurs équipes que nous formons dans le cadre de notre dispositif de formations Boite à outils.

Un article issu du projet de recherche Economie & Métiers de la transition en région lyonnaise et rédigé par Martin Durigneux

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