Comment gérer les déplacements des personnes salariées ?

– Décryptage juridique –

Un article rédigé par Alice Roure dans le cadre de la Lettre Solutions de juin 2025

Que ce soit pour se rendre en mission, en formation ou encore en séminaire, les raisons qui amènent les personnes salariées à se déplacer hors de leur lieu de travail habituel sont nombreuses. Quelles conséquences cela a-t-il sur la gestion de leur temps de travail ? Et leur rémunération ? On fait le point dans cet article.

Le temps de déplacement des personnes salariées est-il un temps de travail ?

Afin de savoir comment gérer un temps de trajet, il est nécessaire de déterminer s’il a ou non la nature d’un temps de travail effectif. Cela permet en effet de déterminer :

  • si ce trajet sera rémunéré ou non, et comment, puisque le salaire de base est égal au taux horaire multiplié par le temps de travail effectif de la personne salariée
  • comment sera décompté le temps de travail de la personne, afin notamment de s’assurer du respect des durées maximales de travail et minimales de repos, et éventuellement de suivre le décompte des heures supplémentaires effectuées par la personne.
💡 Bon à savoir ! Dans le silence du Code du travail, les tribunaux ont défini le temps de travail effectif comme celui pendant lequel une personne salariée se tient à la disposition de sa structure employeuse, doit se conformer à des directives et ne peut pas vaquer librement à ses occupations personnelles. Ces trois conditions sont cumulatives : si elles ne sont pas toutes remplies, le temps concerné n’est pas un temps de travail.

📋 À noter : Les durées maximales de travail sont de 10 heures par jour et 48 heures par semaine. La durée minimum de repos doit être de 11 heures par jour et 35 heures par semaine.
Les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de la durée légale de travail, soit en principe au-delà de 35 heures par semaine, ou 151,67 heures par mois si le temps de travail est organisé sur le mois.

La nature du temps de trajet varie donc selon le moment et les circonstances dans lesquels a lieu ledit trajet :

  • lorsque le temps de trajet a lieu avant le début ou à la fin de la journée de travail, il n’est pas un temps de travail. Il n’est donc pas rémunéré comme tel. Pourtant, il doit faire l’objet d’une indemnisation dans plusieurs situations présentées dans la question suivante
  • lorsqu’un trajet a lieu au sein de la journée de travail, entre deux lieux de travail différents, il s’agit bien d’un temps de travail, rémunéré normalement. Il n’est donc pas question de ce type de trajet dans la question suivante.

🚨 Attention ! La part du temps de déplacement qui déborde sur le temps de travail habituel ne doit pas entraîner de perte de salaire. Cela signifie que si un trajet a lieu en partie durant la journée de travail, le salaire correspondant doit être versé normalement à la personne concernée. En pratique, cela revient simplement à ne pas effectuer de retenue de salaire pour la journée concernée, peu importe que le temps de trajet ait débordé sur la journée habituelle de travail.

Dans quelles situations et comment le temps de trajet est-il indemnisé ?

1/ Les trajets concernés :

Le temps de trajet habituel entre le domicile et le lieu de travail n’est pas indemnisé.
En revanche, dès lors qu’un trajet dépasse ce temps de trajet habituel, il doit faire l’objet d’une contrepartie.

Exemple : une personne salariée quitte son domicile à 8h et se rend sur son lieu de travail habituel, dans les locaux de sa structure. Elle arrive à 8h15, après 15 minutes de trajet habituel. Ce temps de déplacement n’est pas un temps de travail et n’est pas indemnisé.

À 10h, elle quitte les locaux de sa structure pour se rendre sur le lieu d’une animation. Elle arrive à 10h45. Ces 45 minutes font bien partie de son temps de travail et sont rémunérées au même titre que le reste de sa journée.

À 17h, son animation est terminée, tout comme sa journée de travail. Elle rentre directement chez elle et arrive à 18h. Cette heure de déplacement n’est pas un temps de travail, mais 45 minutes doivent être indemnisées dans la mesure où elles dépassent les 15 minutes de trajet habituel de la personne salariée.

1/ Les modalités d’indemnisation :

L’indemnisation du temps de trajet peut se faire sous forme financière ou sous forme de repos, conformément au choix fait :

  • en priorité par un accord négocié au niveau de votre structure,
  • à défaut, par les partenaires de la branche, dans votre convention collective (la CCN, voir le décryptage d’octobre 2025),
  • à défaut encore, par la direction de votre structure, après consultation du comité social et économique, s’il en existe un.

Exemple : dans la branche de l’animation, la CCN Éclat prévoit que le temps de trajet indemnisé donne lieu aux contreparties suivantes :
– jusqu’à 18 heures de déplacement cumulées dans le mois, un repos de 10 % du temps de déplacement ;
– au-delà de 18 heures de déplacement cumulées dans le mois, un repos de 25 % du temps de déplacement excédant 18 heures.
Le repos peut également être compensé par une compensation financière équivalente si les parties sont d’accord.

📋 À noter : Les frais liés à un déplacement doivent également être pris en charge : billet de train ou de transport en commun remboursés, frais kilométriques indemnisés, repas pris en charge le cas échéant… Vous pouvez trouver les principales règles liées à ces frais professionnels sur le site de l’Urssaf.

Cette prise en charge des trajets ponctuels se cumule à l’obligation, pour les trajets quotidiens entre le domicile et le travail, de prendre en charge 50 % du prix des abonnements aux transports en commun souscrits par la personne salariée.

Quelles sont les règles en cas de déplacement en mission longue ?

Lorsqu’une personne salariée se rend en mission longue, par exemple pour deux journées de formation dans une autre ville, ou pour un séminaire, avec une nuit sur place, les mêmes règles s’appliquent :

  • le temps de trajet pour se rendre sur le lieu de mission est indemnisé pour sa part débordant le temps de trajet habituel, voire payé normalement pour sa part coïncidant avec la journée de travail habituelle 
  • le temps de travail en journée, la formation ou la participation au séminaire pour reprendre nos exemples, est un temps de travail effectif, normalement rémunéré 
  • les temps de repos (repas et nuit à l’hôtel) ne sont pas des temps de travail puisque la personne salariée, bien que loin de chez elle, ne doit pas se conformer à des directives et peut vaquer à des occupations personnelles. En revanche, si la personne est contrainte de dîner avec des partenaires par exemple, ce temps de repas sera considéré comme un temps de travail.

Un article dans le cadre de la Lettre Solutions

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